À l'aube, je vais dans le marais du castor. Je l'appelle ainsi même si le castor n'y vit plus depuis longtemps. Le paysage est encore imprégné de son passage, les souches de peupliers encore marquées par ses incisives, les arbres morts encore debouts, témoins de l'inondation créée par son barrage de plusieurs dizaines de mètres de long. Maintenant, la vie est toujours foisonnante. J'y observe le héron vert et le martin-pêcheur qui chassent. Le couple de bernaches qui patauge passera l'été ici, comme les autres années. J'admire leur endurance, leur candeur et leur grâce. J'apprécie leurs cris qui me réveillent aux premières lueurs de l'aube, et je souris de voir leurs jeux, leurs envols d'un étang à un autre.
J'observe comment, malgré la neige et les nuits froides, les hémérocalles perçent la terre gelée de leurs pousses si vertes dans une toile de couleurs ternes. J'admire les mouches qui volent déjà, encore engourdies, mais bien vivantes.
Le printemps me rappelle que la vie est forte, malgré les grandes noirceurs de l'hiver, viendra un temps où la vie et l'harmonie reviendra. Pourtant, pendant l'hiver, on a l'impression qu'il ne finira jamais! Je me plais à penser au printemps de notre ère, et je l'attends, heureux.